Mehdi Charef et Hamada livrent leur Cartouches Gauloises...

Le rendez-vous est pris dans un restaurant chic des Champs-Elysées, où le réalisateur Mehdi Charef et le jeune acteur Hamada doivent nous parler de Cartouches gauloises, chronique d’un printemps 62 en Algérie, à travers le regard d’un enfant.
Le regard en question appartient au très convaincant Hamada, déjà encerclé par les journalistes. Répondant aux interviews avec une aisance déconcertante, il laisse sur le visage de ses interlocuteurs un sourire admiratif…Mais pour l’instant, l’heure est à l’attente.
Heureusement pour votre humble serviteur, également critique culinaire, le service est impeccable et mon impatience se dilue rapidement dans les bulles de champagne…
Enfin, Medi Chareb vient s’asseoir à nos côtés. L’homme est trapu, souriant, et sa seule exigence réside en deux éléments essentiels : briquet et cendrier. Très vite il se met à table…

A la première question sur les origines du projet, il répond du tac au tac : "Ce film, je le porte en moi depuis toujours." Medi Charef se confie sur ce long-métrage difficile à écrire, à tourner. Pour lui qui se filme lui-même et met à nu sa mémoire en donnant des visages aux fantômes de son enfance, certaines scènes ont été proche du calvaire. Il nous raconte comment après une prise particulièrement violente où Ali/Medi voit sa tante se faire fusiller, le réalisateur, choqué, a dû cesser le tournage pour la journée…
A propos du casting, Medi Charef raconte : "Pour le rôle d’Ali, on a beaucoup cherché en région parisienne, mais peu d’enfants parlaient parfaitement l’arabe. Alors nous sommes allés dans le Sud, à Toulon et à Marseille et là, ils parlaient bien la langue de leurs parents…Mais le Français avec l’accent du sud, c’était pas possible ! Et puis, un jour, on est tombé sur Hamada."

Justement, des éclats de rires se font entendre. Et c’est Hamada, du haut de ses treize ans, qui fait son show à la table d’à côté. Tout de suite, le regard de Medi Charef s’éclaire.
"Incroyable", "Epoustouflant"Tels sont les mots qu’il emploie pour parler du travail de cet acteur amateur, découvert après plus de 200 auditions, dans une province d’Oran. En guise d’explications sur ce choix, il nous montre l’affiche du film qui trône à côté de nous et pointe le doigt sur le regard particulièrement profond de Hamada…Tout est dit.

Et voici venir ce petit acteur bondissant qui, bien rôdé par son séjour à Cannes, impressionne tout le monde par son aisance, son intelligence et bien sûr, ce regard qui vous enveloppe littéralement. Très fier, il nous raconte ses projets d’avenir, son envie de devenir médecin, malgré cette passion naissante pour la comédie. Lorsqu’on lui demande si la responsabilité du premier rôle n’était pas trop dure à gérer, il répond simplement :
"Non. J’écoutais seulement ce que me disait Mehdi."

Entre deux poignées de chips, il redevient l’enfant de treize ans qu’il est pour jouer avec un appareil photo avant de, quelques secondes plus tard, reprendre le fil d’une conversation sur l’héritage de la guerre pour des jeunes algériens comme lui. Le film, dit-il, lui a donné envie d’en savoir plus sur cette période qu’il connaît bien, pour l’avoir étudier à l’école, mais peu en profondeur.
Tout le monde le couve avec de grands yeux attendris, et Mehdi Charef le premier.
"J’aimerais beaucoup retravailler avec lui.", nous confie t-il.

Hamada, tu connais Jean-Pierre Léaud ?

Propos recueillis par Guillaume Garnier (Paris, juin 2007)