24 jours : Morgan Sportès, auteur d'un livre-enquête sur l'affaire, donne son avis

24 jours : Morgan Sportès, auteur d'un livre-enquête sur l'affaire, donne son avis

Si le film 24 jours, d'Alexandre Arcady, met en scène l'affaire du "gang des barbares" comme une tragédie grecque, "mon propos était politique et complètement différent", dit à l'AFP Morgan Sportès, auteur d'un livre-enquête qui dissèque ce fait divers effrayant.

Dans son film (sur les écrans mercredi), Alexandre Arcady raconte ce drame du point de vue de la mère d'Ilan Halimi, jeune Juif assassiné en 2006 après avoir été torturé pendant trois semaines par ceux que les médias ont baptisés "le gang des barbares". Leur chef, Youssouf Fofana, a été condamné depuis à la perpétuité.
"Quand on parle de la douleur d'une mère, on est dans la tragédie grecque, dans l'intime, l'émotion et les sentiments. C'est le parti-pris qu'a choisi le cinéaste. Moi, mon propos était politique, distancié, complètement différent", explique l'auteur de "Tout, tout de suite" (Fayard), prix Interallié 2011.

"Je ne juge pas, je montre. Je ne fais pas de psychologie. Pour moi, un fait divers est comme un microscope à travers lequel on regarde les maladies de notre société", poursuit l'écrivain et co-scénariste du film réalisé, sur la même affaire, par le comédien Richard Berry. Le scénario de ce film, attendu en septembre, "se rapprochera de mon livre". "Mon roman était une sorte d'archéologie des années 2005/2006, juste avant la crise. On voyait déjà une régression de la société vers les religions, avec l'impression de se retrouver au 16e siècle ! Et la régression d'un monde où tout est devenu mercantile", relève Morgan Sportès.

Dans son livre, l'écrivain restitue les dialogues pathétiques des bourreaux. Il a interrogé les inspecteurs de la Crim, la juge d'instruction, lu les scripts des coups de fil entre le père d'Ilan et les ravisseurs, correspondu avec certains membres de la bande, mais n'a pas parlé avec la famille de la victime. "La mère d'Ilan a écrit son propre livre et elle a assez souffert. Mon roman était axé sur l'aliénation des ravisseurs", souligne-t-il. "C'est un témoignage de l'effroyable vide que la société a laissé se creuser en son sein, du degré d'aliénation de ces jeunes, couplé à leur indigence intellectuelle. Fofana était une sorte d'éponge de tous les fantasmes primaires sur les Juifs, une espèce de pot-pourri de tous les poncifs".

"Pour sortir du manichéisme, rappelons que c'est la famille de Fofana - de confession musulmane -, à Abidjan, qui a fait arrêter le chef du gang des barbares", insiste Morgan Sportès.

(27 Avril 2014 - Relax News)