Carrie, la vengeance : un bain de sang tiède et déjà vu (Test DVD)

Carrie, la vengeance : un bain de sang tiède et déjà vu (Test DVD)

‪Née sous la plume du maître de l'horreur Stephen King, Carrie White est l'exemple stéréotypé d'une jeune adolescente qui est mal dans sa peau, maltraitée et humiliée par ses proches. Une histoire tragique qui se termine en apothéose avec une Carrie plus effrayante et ensanglantée que jamais. Mais qui est Carrie ? Ce personnage mystique habite dans la ville de Chamberlain, dans le Maine. L'héroïne, de son vrai prénom Carrietta "Carrie" White, est très timide et discrète, et subit les moqueries incessantes de ses camarades de classe. En plus de ces persécutions, Carrie est élevée par une mère fanatique religieuse. Mais très vite, un événement inéluctable va basculer le cours de l'histoire. Carrie, qui découvre qu'elle a le pouvoir de télékinésie, va se venger et déverser toute sa haine contre tout le monde (Cf : la fameuse scène du bal de promo).‬

Très en avance sur son temps, Stephen King aborde avec talent les thèmes de l'isolement et de l'intimidation des jeunes adolescents dans les années 70. Son livre sort en France en 1974, victime de son succès, deux ans après une adaptation cinématographique est réalisée. Carrie est un chef d'œuvre qui est ancré désormais dans les classiques de son genre grâce au réalisateur Brian De Palma (Scarface). Une adaptation linéaire certes, mais reprenant presque l'histoire page par page du King. À l'époque, De Palma avait réussi a retranscrire le récit par le biais d'images d'une pureté et d'une réalité palpable. Après 37 ans d'existence, Carrie White revient sur grand écran, avec cette fois-ci la réalisatrice Kimberly Peirce (Boys Don't Cry). Il est vrai qu'il est difficile de s'empêcher de comparer ses deux versions qui se basent sur la même histoire, mais dans des époques bien éloignées ; et c'est bien là que se fait ressentir la grosse différence.

‪Sorti fin 2013, le film Carrie, la vengeance de Kimberly Peirce a tous les ingrédients pour réussir : un scénario déjà écrit et des acteurs choisis méticuleusement. Mais malgré tous ces bons points, on se demande bien quelle prise de risque Kimberly Peirce prend-elle ? À vouloir bien faire et bien réadapter le récit comme dans le roman et l'adaptation de De Palma, Kimberley Peirce nous sert un remake du remake…Une copie presque conforme de celle De Palma avec quelques détails apportant de la modernité et de l'originalité (si on peut dire); histoire de rester dans l'air du temps. Peirce dresse un travail respectable mais pas si mémorable. La réalisatrice a imaginé une Carrie 2013, avec quelques plans qui amènent une touche de la culture populaire du XIX ème siècle au film. Notamment, le coup des vidéos sur les réseaux sociaux, ou bien des téléphones portables qui enregistrent la scène où Carrie se fait humilier par ses camarades dans la douche.‬

Le point fort : ‪Si dans le premier remake on sentait plus l'abandon et le rejet de l'enfant, la Carrie de Kimberley Peirce semble avoir tissé un peu plus de liens d'amitié et d'amour. Peirce s'appuie notamment sur une relation mère-fille qui se mêle dans tous les sens, de l'entente à la discorde. On trouve ce trait psychologique qui apparaît dans le livre. Tout au long du film, on aperçoit à la fois une mère protectrice, aimant et une mère déchirée et haïssant sa propre fille. Petite mention spéciale à Julianne Moore qui s'en sort très bien et donne même l'impression par moment d'être possédée. Quant à Chloé Grace Moretz, il est vrai qu'elle ne correspond pas spécialement à la description de la Carrie du King, qui la voyait plutôt avec un physique bizarre et atypique. Avec ce visage d'ange et innocent, elle manque cruellement de véracité et ses gestes ne sont pas convaincants. Où est la Carrie terrifiante, cruelle et froide comme Sissi Spacek, dans la version de De Palma? Cependant, la scène du bal est particulièrement spectaculaire, avec ses différents cadres et mises en scène lorsque le seau remplit de sang de porc se déverse sur Carrie. Globalement, Chloé Grace Moretz et Julianne Moore déballent une performance très harmonieuse et saillante. ‬

‪Le casting reste assez solide. Les personnages secondaires, Chris, la garce par excellence est bien incarné et joué par l'actrice Portia Doubleday. On s'attache également à l'empathie du personnage de Sue envers Carrie, jouée par Gabriella Wilde. Et bien sur, aussi bizarre soit-il la réalisatrice a voulu donner davantage d'importance à la professeur de sport, Miss Desjardins, interprétée par Judy Greer, quasi-inexistante dans le livre. Le personnage intervient comme une mère de secours pour Carrie, en la protégeant des autres camarades et en la rassurant. Un choix qui ne dérange pas plus que ça dans le scénario, et qui ajoute un peu plus de sentiments affectifs envers Carrie.‬

Un remake impersonnel, malgré quelques séquences frappantes qui rattrapent les déjà vu et revu notamment avec la scène d'ouverture et celle de fermeture. Avec un aspect soigné et propre, ce Carrie version 2013 reste dans l'ombre de celui de De Palma. En définitive, le film n'est pas essentiel, mais reste une bonne distraction.

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Octavie Pareeag (18 avril 2014)