Hermanas, que la vérité soit (test DVD)

A l'occasion de la sortie d'un coffret DVD comportant deux films de la réalisatrice argentine Julia Solomonoff, retour sur Hermanas, son premier long-métrage, à la fois fort et délicat.

Hermanas, c'est d'abord l'histoire de deux soeurs qui s'aiment mais que tout oppose. Un "blabla" classique me direz-vous ? Un gros déjà-vu ? Pas du tout. En 1976, Natalia, la soeur farouche et rebelle, est contrainte à fuir l'Argentine en pleine installation d'une dictature, sous la pression des militaires ayant fait mystérieusement disparaître son fiancé (qui se battait en secret pour la révolution). Après 8 ans en Espagne, où elle est devenue une journaliste engagée, elle rend visite sa soeur Elena, plus rigide et sérieuse, qui s'est installée depuis peu dans le calme presque aseptisé d'une petite ville au Texas. Les deux soeurs découvrent alors parmi un tas de vielles photos et carnets, le dernier roman - jamais paru - de leur père décédé.

Vous voyez ? Plus complexe qu'il n'y parait. Et j'ai encore mieux. Le roman que lit la jeune Natalia raconte en réalité une histoire tragique, celle de leur propre passé. Celle-ci tente alors, tout en profitant de sa famille, de comprendre les raisons de la disparition de son fiancé. A travers une série de flashbacks bien construits, les explications prennent forme, autour d'un noyau énigmatique. Le film a donc en sa faveur la résolution d'un mystère croustillant... Et que la vérité soit.

En fond, la réalisatrice travaille sur les oppositions. D'abord entre les deux soeurs bien sûr, mais aussi entre ces maisons toutes égales et alignées dans ce quartier Texan parfait et sans vie, et cette Argentine passée, où la vie se déroulait sous le signe de la peur et du mouvement, dans une grande imperfection. C'est cette absurdité d'une vie faussement tranquille qui tente de suivre son cours, malgré un passé tragique, qui marque un des points forts d'une mise en scène simple et subtile. Les couleurs, les vêtements, la lumière, rappellent sans cesse un vieux polaroïd de l'époque où Madonna chantonnait "Like a Virgin", accentuant l'effet vintage, et s'adaptant parfaitement au propos.

Et comme dans une veille boîte pleine de souvenirs, le passé finit par éclater, créant une tension extrême au milieu d'un supposé bonheur familial. L'histoire de famille et l'Histoire d'un pays s'emmêlent, s'entrecroisent, au service de la peinture d'un portrait humain, portée par un duo d'actrices complices et très justes.

Le DVD

Rien de folichon à l'horizon côté bonus malheureusement. On a le droit à des affiches alternatives, une galerie photo, une bande-annonce et une filmographie. Bof, bof. Mais... attention, coffret oblige, vous pourrez vous régaler doublement (ou pas) avec Le Dernier été De La Boyita l'autre film, qui lui, en plus, a des bonus beaucoup plus intéressants...

Un mot pour la fin : relativisons. Votre tante vous a offert une boîte de chocolats périmés pour votre anniversaire ? Vous êtes de voyage au Tonga avec votre conjoint et avez envie de le tuer ? Et bien voilà un film pour vous montrer que même ayant traversé le pire, il est possible d'aimer ceux qui vous entourent malgré tout. Rangez les violons, car voilà une belle leçon de courage sans larmes inutiles.

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Bruna Fernandez (28 Octobre 2011)