Hunger Games, la mort en direct (Test Blu-Ray)

Hunger Games, la mort en direct (Test Blu-Ray)

Dans un futur pas si lointain, chaque année sont organisés les Hunger Games. Commémoration sanglante de la révolte du peuple contre le gouvernement de Panem (Le Capitole), ces jeux du cirque modernes ont pour but de rappeler à tous le prix de la désobéissance : chacun des douzes Districts doit y sacrifier deux jeunes "tributs" (un garçon et une fille) et les observer ensuite s'entretuer en direct au cours d'un jeu télévisé. Terrorisé par les représailles en cas de refus, le peuple de Panem ne peut qu'obéir.
Cette année, pour les 74èmes Hunger Games, la soeur cadette de Katniss, 16 ans, est tirée au sort pour représenter le District 12. La jeune femme, désespérée, va se porter volontaire et entrer dans l'arène à sa place.

 

Les livres

Véritable phénomène littéraire - encore bizarrement discret de ce côté de l'Atlantique - la saga de Suzanne Collins a contaminé absolument tous ceux qui ont osé toucher la couverture d'un des volumes de la trilogie Hunger Games. Annoncée comme le successeur de Harry Potter et comparée - à tort ! - à Twilight, cette épopée post-apocalyptique a littéralement bluffé des millions de lecteurs (le premier volet s'est vendu à plus de 30 millions d'exemplaires dans le monde depuis sa parution en 2008 et les ventes de la saga dépassent aujourd'hui celles du sorcier de J.K. Rowling sur Amazon) dont les plus éminents critiques et même des auteurs tels que Stephen King.

Comment diable expliquer un tel succès public et critique ? Tout simplement par la géniale alchimie d'une intrigue béton et d'une empathie imparable pour l'héroïne. Impossible, en effet de passer à côté de la qualité indéniable de narration de l'auteure, capable de dérouler une implacable dystopie à la fois cruelle et profondément humaine, le spectateur ne pouvant que plonger la tête la première dans une trame haletante tout en s'identifiant instantanément aux protagonistes. Croyez-nous, Hunger Games est un piège : une fois l'ouvrage ouvert, impossible d'y résister ou de s'en extraire avant d'avoir dévoré les trois tomes.
Violente contre-utopie (qui n'est pas sans faire écho à l'univers Orwellien de 1984) nous jetant à la figure tous les travers de notre société cynique et consumériste (au sens sociologique du terme) pour mieux nous dépeindre ensuite les possibilités et les douloureuses implications d'une révolte populaire, Hunger Games sonne comme une étonnante métaphore d'un XXlème au bord de la crise de nerfs. En parcourant les différents volumes et en suivant une héroïne qui cherche sa propre morale individuelle et lutte contre l'immoralité étatique, comment, en effet, ne pas penser à notre entertainement déshumanisé, à notre civilisation du paraître, aux nouvelles formes de dictatures et aux vents de révolte qui ont balayé la planète depuis déjà plusieurs années ?

Le film

Avec un tel pedigree, l'adaptation cinématographique de Hunger Games ne pouvait qu'attirer tous les regards... et toutes les convoitises. Et là - surprise ! - c'est le (relativement) petit studio Lionsgate qui décroche la timbale et qui confie le bébé au réalisateur Gary Ross. Remarqué grâce à des films comme Pleasantville ou les scénarii de Big ou la légende de despereaux, le cinéaste prend le projet à bras le corps et se lance dans un minutieux travail d'adaptation, épaulé par Suzanne Collins elle-même. Parallèlement, un casting audacieux se met en place : Jennifer Lawrence, l'incroyable révélation de Winter's Bone, est choisie pour incarner Katniss, Woody Harrelson sera son mentor Haymitch tandis que Donald Sutherland prêtera ses traits au terrible Président Snow. Elizabeth Banks, Josh Hutcherson, Liam Hemsworth, Stanley Tucci ou Wes Bentley les rejoindront rapidement, puis le tournage est lancé dans une relative discrétion. La sauce promotionnelle montera ensuite progressivement jusqu'au printemps 2012, date de la sortie en salles du film.

Hunger Games version ciné est-il à la hauteur des attentes ? Assurément oui.
Si l'on s'attache, d'une part à la "réussite" d'une telle adaptation, force est de constater que Gary Ross a fait du bon boulot. Visiblement imprégné du matériau d'origine, le réalisateur affiche un profond respect au livre (notamment dans l'humanité de Katniss, héroïne imparfaite, méfiante, manipulatrice et protectrice), tout en distillant avec malice et intelligence des "ajustements" plus que salutaires (les coulisses du jeu). S'appuyant sur l'intrigue cyniquement frontale de Hunger Games, Gary Ross s'attache à développer une authenticité brutale dans l'instrumentalisation des enfants afin de provoquer une certaine forme de malaise et d'éviter ainsi un voyeurisme gratuit.

Si, en revanche, on se détache du phénomène littéraire, on trouve dans le long-métrage un survival nerveux et efficace, dont les quelques moments de bravoure (la glaçante scène de la moisson, les coulisses d'une émission mortelle, les premiers pas dans l'arène, etc.) suffisent à insuffler au film un vent d'aventure franchement excitant. Philip Seymour Hoffman, Sam Claflin ou Amanda Plummer, qui rejoignent le second volet Hunger Games - L'embrasement, ne s'y sont d'ailleurs pas trompé.
Que demande le peuple ?

 

Le Blu-Ray

Très belle sortie dans les bacs pour Hunger Games, même si, comme souvent, on vous conseillera chaudement de porter votre choix sur la sortie Blu-Ray du film de Gary Ross. En effet, à côté d'un film impeccablement restitué, on a le loisir de se plonger dans pas moins de trois heures de - vrais - bonus. Excellente mise en bouche avec un making-of en neuf parties de près de deux heures (du travail d'adaptation à l'esthétique du long-métrage en passant par la préparation physique des acteurs et les coulisses de la post-production), suivi de séries d'interviews de fans, d'éditeurs, de critiques littéraires et cinématographiques, du réalisateur ou des techniciens, producteurs et acteurs du film. On y découvre notamment dans Suzanne Collins et le phénomène Hunger Games que l'ouvrage est tellement populaire au pays de l'Oncle Sam qu'il figure au programme des lycées. L'énorme investissement de Gary Ross, de Jennifer Lawrence ou de Donald Sutherland transparaissent également dans les documents Conversation entre Gary Ross et le critique Elvis Mitchell ou Donald Sutherland est le Président Snow.
Entre secrets de tournage et émulation à toute épreuve, difficile de résister.

=> Voir notre dossier Hunger Games pour les Nuls
=> Toutes les infos sur le film Hunger Games

Eléonore Guerra (23 Août 2012)