L'Apollonide, souvenirs émus d'une maison pas si close (test DVD)

L'Apollonide, souvenirs émus d'une maison pas si close (test DVD)

À l'aube du XXème siècle, au coeur d'une maison close parisienne, voici une prostituée mutilée, voilà une autre atteinte de syphilis, celle-ci n'a pas trente ans mais est déjà trop vieille, celle-là refuse de s'avouer vaincue. Du monde extérieur, on ne saura rien. La maison est close.

 

La chair est belle... et triste

Concurrent malheureux lors du 64ème Festival International Du Film De Cannes 2011 et nommé discret - mais solide, avec huit citations - de la prochaine 37e Cérémonie Des César 2012, L'apollonide, souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello débarque dans les bacs, pour le plaisir des yeux et des oreilles.

Dans cette chronique incarnée et désenchantée des derniers jours d'un bordel (mais pas du métier de prostituée), le long-métrage peint - au sens presque littéral du terme - une élégante valse de poupées salies, dans laquelle rêves, (dés)illusions, argent et pouvoir s'entremêlent, habillement piégés dans une cruelle ritournelle.
Car c'est en boucle que le film de Bonello fonctionne et agit. Au delà de l'écho entre les séquences d'ouverture et de clôture, les répétitions des scènes, des gestes du quotidien, des espoirs brisés, soulignent cliniquement l'hermétisme total de ce paradis infernal (ou enfer paradisiaque ?), créant ainsi une temporalité inédite et étirée, jouant - hypnotique - avec les différents espaces et points de vue (hommes/femmes, intérieur/extérieur, dominant/dominant, libre/asservi).

Multipliant les symboles (de l'héritage pictural fin de siècle à celui de l'irrépressible destinée façon Zola en passant par l'analogie prostituées=actrices), le réalisateur de De la guerre propose un étrange et décadent portrait de femmes, un constat diablement contemporain et admirablement mis en lumière et en musique par un cinéaste qui aime les filles d'Eve.
Une expérience à la fois sensorielle et cérébrale. Tout un programme.

 

Le DVD

En plus du film, la galette de L'apollonide, souvenirs de la maison close vous proposera deux modules tous droits issus des coulisses du film de Bertrand Bonello. Vous pourrez en effet découvrir à la fois les essais des actrices (et évaluer, par la même occasion, l'intuition bluffante du cinéaste) et l'analyse de la séquence d'ouverture du film. Instructif en diable.

=> Toutes les infos sur L'Apollonide, souvenirs de la maison close

Eléonore Guerra (13 Février 2012)