Alors que son arrestation en Suisse, samedi dernier, fait polémique, l’agent de M.Polanski s’interroge sur l’avenir de son film : The Ghost, qui devait sortir en mars prochain.
La possible extradition du cinéaste franco-polonais est un incident de post-production comme on en connaît peu. D’autant que son agent, Jeff Berg, explique que Roman Polanski devait encore ajouter la musique et finaliser le mixage de son film. Beaucoup d’incertitudes donc, alors que la sortie de The Ghost était prévue pour mars prochain en France.
L’histoire est celle d’un homme de l’ombre (Ewan McGregor) qui doit écrire les mémoires du Premier ministre britannique Adam Lang (Pierce Brosnan). L’auteur sans succès pense que c’est l’occasion de sa vie, mais il va rapidement se rendre compte qu’il est en danger…
A priori un bon scénario donc, s’intéressant aux fantômes du passé qui nous hantent et à la puissance de l’administration semble-t-il, mais l’agent de M. Polanski va devoir faire face à un calendrier serré. Le réalisateur d’Oliver Twist a, pour le moment, d’autres préoccupations et aucune décision n’a été prise, quant à la finalisation ou la suspension du film ; tout dépendra de l’extradition (ou pas) du cinéaste.
Depuis hier, on sait que le réalisateur s’est dit choqué, bien qu’il s’attendait à une extradition depuis 30 ans ; et que la presse britannique est beaucoup plus divisée que l’opinion française sur la question. Certains journalistes britanniques s’indignent, en effet, de la protection du cinéaste au plus haut niveau de l’Etat en France, au vu du crime qu’il a commis : « relations sexuelles illégales avec une mineure ». Ils appellent parfois à se mettre à la place des parents de la victime, et invitent surtout à mesurer les messages de soutien au brillant criminel, aussi talentueux soit-il.
Dans une interview accordée à la chaîne ABC, Roman Polanski aurait tenu le discours suivant il y a quelques mois : « A cette époque, il m'a été très difficile de me persuader que c'était mal. Je pensais que personne n'en avait souffert. Plus tard, j'ai réalisé que ce n'était pas bien de faire ça mais il n'y avait aucune préméditation, c'est juste arrivé comme ça. Je ne comprends pas pourquoi je devrais être puni pour ce penchant que j'éprouve pour les très jeunes femmes. Mais ce qui s'est passé à Los Angeles concernait une trop jeune fille et c'est ce qui a causé toute cette affaire ».
Tandis que dans le journal Le Monde, on peut lire l’opinion d’Alexandre Tylski (auteur de "Roman Polanski, une signature cinématographique", éditions Aléas, 2008) qui considère que « Polanski a reconnu les faits, accepté de faire de la prison et a payé une amende de trente et un ans d'exil et d'humiliations publiques et médiatiques. Une sentence largement plus lourde que prévu. Que leur faut-il de plus ? ». L’auteur va même plus loin, en considérant l’acharnement de la justice américaine comme Kafkaïen ; on peut simplement s’interroger sur l’opportunité de fuir pour un innocent.
Surtout lorsque le coupable dispose d’un pouvoir médiatique qui lui aurait permis d’éclairer sur sa situation, d’expliquer en quoi il se sentait aussi victime et pourquoi il a fait boire la mineure qu’il prenait en photo ? Comme de nombreux journalistes le rappellent, « beaucoup de groupes rock n’auraient pas fait tant de disques si on avait dû les arrêter ! », « les années 70, c’était une autre époque… » Mais l’enfant dans tout ça ? Fallait-il sacrifier Samantha Geimer pour avoir Tess ou Le Pianiste ? Est-ce que le retrait de plainte de la victime devrait automatiquement arrêter la machine judiciaire ?
Après les réactions de soutien au cinéaste, de la part de Frédéric Mitterrand (Ministre de la Culture et de la Communication) et de Bernard Kouchner (Ministre des Affaires Etrangères), les députés UMP se sont aujourd’hui levés contre ces déclarations qui « oublient que le viol d’une enfant de 13 ans n’est pas quelque chose d’anodin » ! Et vous , que pensez-vous de cette affaire ? Faut-il sauver ou condamner Polanski ?
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Pierre-Olivier Bonne (29 septembre 2009)