Prisoners : film-miroir de la filmographie de Denis Villeneuve

Prisoners : film-miroir de la filmographie de Denis Villeneuve

Prisoners sera diffusé ce soir sur M6. L’occasion pour Comme au Cinéma de revenir sur certains des thèmes clés du talentueux réalisateur Denis Villeneuve.

Quatrième long-métrage du réalisateur, Prisoners prend place dans la banlieue de Boston alors que deux fillettes Anna et Joy ont disparu. Le détective Loki (Jake Gyllenhaal) est chargé de l’enquête et tente d’agir le plus rapidement possible, les chances de survie des disparues s’amenuisant d’heure en heure. Un suspect est rapidement identifié en la personne de Alex Jones (Paul Dano), étrange voisin qui suscite immédiatement la suspicion de l’enquêteur. Ce dernier manque toutefois de preuves pour garder captif ce suspect des plus étranges et se doit de le relâcher. Cette décision entraîne la colère de Keller (Hugh Jackman), père d’Anna aveuglé par son désespoir. S’engage alors une course contre la montre haletante qui va mettre à mal les nerfs de ses personnages mais également ceux du public.

Prisoners est un drame psychologique prenant, dont l’intrigue se révèle à la fois complexe et tragique. Chaque personnage mis en scène par Denis Villeneuve est tiraillé par des doutes et de peines incommensurables, ce qui permet au réalisateur de construire un récit humain et très réaliste. Hugh Jackman incarne ici un père de famille en lutte constante, tentant de faire justice à sa manière tout en protégeant ce qu’il lui reste de stabilité, à savoir sa famille. Sa carapace de bon vivant et d’homme respectueux se fracture résolument pour révéler un personnage en lutte avec sa tristesse et sa colère. Lui fait face un détective tout aussi torturé, faisant lui aussi face à ses propres démons, bien plus atteint qu’il ne l’aurait cru par cette sombre affaire de kidnapping. Les échanges entre les deux hommes se font de plus en plus tendus au fil de l’oeuvre, Denis Villeneuve s’appuyant sur des dialogues d’une grande justesse qui traduisent à merveilles la crise tragique dans laquelle se trouvent emprisonnés ces deux enquêteurs. En mettant en scène une multitude de crises, à la fois familiales et personnelles, le réalisateur revient à une problématique qu’il avait déjà exploité dans son film Incendies, drame familial qui avait ébranlé plus d’un spectateur. Des choix narratifs que l’on a également pu observer dans la dernière oeuvre du cinéaste, alors que la scientifique Louise Banks (Amy Adams) devait concilier son propre destin de mère et celui de l’humanité toute entière dans Premier Contact.

Dans cette quête pour retrouver Anna et Joy, un questionnement sur la justice, tant divine qu’humaine, est rapidement dressé dans Prisoners. Face aux délais et blocages de l’administration policière, Keller s’empare de l’enquête et entend bien utiliser ses propres procédés pour découvrir la vérité sur le kidnapping de sa fille. Débute ainsi une nouvelle course-poursuite, entre Loki et ce père de famille chevronné et inconscient qui met en péril le bon déroulé de l’enquête et agit, sans le savoir, au détriment de la disparue. Comme dans Incendies trois ans plus tôt, Villeneuve pose à nouveau un problème concernant la justice et la capacité de chacun à vouloir l’établir soi-même. Une notion soumise à la subjectivité de chacun, à l’image d’Alejandro (Benicio Del Toro) dans Sicario, cherchant à assouvir sa quête de vengeance personnelle, défiant les règles - pourtant bien troubles - de la justice américaine. Se soumettre au système ou suivre sa propre conviction est bel et bien une question qui parcourt l’oeuvre de Villeneuve et qui reviendra, pour sûr, dans son prochain film. En effet, le réalisateur va s’attaquer au sequel de Blade Runner, film culte de Ridley Scott qui a vu Rick Deckard, un agent d’une unité spéciale, se détourner de sa hiérarchie pour poursuivre une quête amoureuse et rester fidèle à ses convictions. Avec le virage qu’il a opéré dans Sicario en se tournant vers un genre davantage spectaculaire et nerveux, Denis Villeneuve a acquis une expertise qui l’aidera à porter ce projet particulièrement ambitieux. Comme on a pu le constater dans son dernier film Premier Contact, on peut s’attendre à ce que le cinéaste allie à nouveau avec justesse drame personnel et enjeux collectifs, avec cette première oeuvre de science-fiction qu’est Blade Runner 2049. Sa capacité à offrir au public des twists finaux inattendus est aussi prometteuse, elle qui nous a déjà ébranlée avec les dénouements de Incendies et Premier Contact. De belles émotions en perspective !

Histoire de vous préparer à la prochaine sortie de Denis Villeneuve, que diriez-vous de regarde la bande-annonce de Blade Runner 2049 ? C’est parti !

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On se retrouve ce soir 21h sur M6 pour voir Prisoners. Enjoy !

Camille Muller (Le 13 mars 2017)