Un drame qui marque les festivaliers...

Mesdames et messieurs la séance va commencer… Le mardi sur les planches deux autres films de la compétition ont été vus, et déjà un favori pour le palmarès.

Il s'agit de Gardens of the night réalisé par Damian Harris, venu avec l'acteur Tom Arnold et la directrice de la photographie Paula Huidobro. Le réalisateur n'ose pas nous dire « bonne projection » à cause du sujet, mais il l'espère qu'on appréciera son film, qu'on a d'ailleurs beaucoup aimé.
Deux hommes mettent en confiance une fillette sur le chemin de l'école et la kidnappent. Elle est ensuite retenue dans une chambre avec un autre petit garçon. La petite Leslie n'a que 8 ans et va bientôt être (elle aussi) l'objet de trafic, « louée » à des pédophiles de toute sorte… On la retrouve plus tard à 17 ans et c'est une prostituée qui dort dans les rues de San Diego. Son enfance a été volée et violée et elle n’a pour seul ami que le garçon qui avait été enlevé avec elle et a occulté que sa famille d'origine était quelque part…
On reconnaît dans le film dans des seconds rôles John Malkovitch, Jeremy Sisto ou Harrold Perrineau mais ce sont les autres qui crèvent l'écran, en particulier les jeunes Gillian Jacobs et Ryan Simpkins.

Quelques extraits de la conférence de presse :
Damian Harris : « J'ai fait plusieurs années de recherche en rencontrant plein de personnes : les protagonistes du film sont en fait une sorte de mélange des enfants rencontrés durant la préparation. Une fille de 16 ans d'un foyer de Los Angeles a eu une vie proche de celle du film. Bien que elle n'ait pas été enlevée, elle a quitté sa maison vers 10 ans et a connu des expériences semblables. Gardens of the night a comme un aspect de conte de fée noir ».
Tom Arnold : « Ce rôle était un risque dans l'esprit de mon agent, mais c'était aussi le cas pour d'autres comme pour le film Animal Factory de Steve Buscemi. Donc ici ce rôle de prédateur était un challenge et je ne voulais pas mal le jouer. J'ai été adolescent dans un foyer à San Diego, et le fait que le réalisateur filme là m'a évoqué des souvenirs. Il s'agit de donner de l'espoir à des jeunes pour leur dire qu'ils peuvent s'en sortir… »

Le quatrième film en compétition est Smart People de Noam Murro, qui était au festival de Sundance 2008. Il a le défaut des films indépendants les plus récents : un scénario à priori intéressant avec un casting de célébrités et au final ça tombe à plat, l'ironie devient gag. Dennis Quaid est un prof d'université imbu de lui-même qui pourrait redécouvrir l'amour dans les bras de la docteur Sarah Jessica Parker, Ellen Page est pire que son père et pourrait s'ouvrir au monde au contact de son oncle immature Thomas Haden Church, bref une famille de prétentieux qui aurait pu être sympathique. Le film tourne en rond sur le thème de « get a life » (s'émanciper, vivre sa vie, oser suivre ses envies…), et on a presque envie de dire que « smart people are boring ».

Le cas suivant est sympathique. Lars est un simplet solitaire. Il étonne donc tout le monde en annonçant qu'il veut présenter sa nouvelle petite amie. Elle s'appelle Bianca, elle est dans un fauteuil, elle n'est pas bavarde… cette femme est une poupée aussi réaliste que possible (sex toy grandeur nature en silicone qui imite le corps humain). Vu que c'est la première fois depuis longtemps que Lars se sociabilise et comme il considère ce mannequin de plastique comme une vraie personne, son entourage va faire de même. Une fiancée pas comme les autres de Craig Gillespie est une comédie qui donne l'occasion à Ryan Gosling de jouer avec une poupée, tout comme Emily Mortimer, Paul Schneider, Patricia Clarkson ou Kelli Garner. Les voisins et les collègues qui se moquaient considèrent bientôt Bianca comme la petite amie de Lars pour ne pas le contrarier, elle est même admise à assister à la messe. En même temps sa famille parvient à lui faire suivre des séances chez un médecin. Lars souffrirait d'un trouble de l'illusion, mais il se pose quand même des questions comme « à quel moment sait-on qu'on est devenu adulte ? »…

Sur le tapis rouge, enfin, on s'abritait de la pluie avec des parapluies rouges aussi, c'était très chic surtout que Deauville allait rendre hommage à l'actrice Parker Posey habillée d'une jolie robe rouge. Hommage heureux, hommage pluvieux annonce le boss du festival en préambule. On accueille sur scène le réalisateur Hal Hartley qui lit un discours pour celle qu'il considère comme une muse. Durant le festival sont prévus plusieurs films dans lesquels à jouer Parker Posey : En route vers Manhattan de Greg Mottola (récompensé à Deauville), Henry Fool et Fay Grim de Hal Hartley, Bêtes de scène, Superman Returns… Sur l'écran passe un montage d'extraits de ses films (Vous avez un message, Scream 3, Blade Trinity…), et elle dit que ce résumé en image de sa carrière est une des choses les plus dingues qu'elle ait vue. La belle Parker Posey illumine de sa présence aussi bien des blockbusters que des films indépendants. Applaudie sur scène elle a improvisé des remerciements (« Vive la France et vous qui aimez le cinéma… ») pour cet hommage qui lui est fait. Le film qui a suivi est Broken English, et sa réalisatrice Zoe Cassavetes est venue elle aussi dire qu'elle était une grande fan de Parker Posey et qu'elle se souvenait du jour où elle lui avait dit oui pour participer à ce premier film. On y voit Parker Posey qui rencontre Melvil Poupaud à New-York, mais cette jolie rencontre ne dure pas longtemps car il repart à Paris, va-t-elle tout quitter pour le retrouver ? Parker Posey est devenue la nouvelle égérie de Deauville.

Christophe Maulavé (Deauville le 10 Septembre 2008)