Venise 2008 : Petit retour sur les films présentés

Il papa di Giovanna : Le réalisateur Pupi Avati nous propose ici un film aux couleurs sépia qui apparemment a fait plaisir aux italiens puisqu’ils y ont vu Francesca Neri et Silvio Orlando. Comme le titre l’indique il s’agit du père, un professeur de lycée, qui entoure sa fille Giovanna - 17 ans mais pas dégourdie - d’affections et de conseils pour qu’elle prenne confiance en elle et qu’elle ose rencontrer un garçon. Un étudiant de son âge lui parle et Giovanna s’emballe, elle est éprise de lui. Mais une autre étudiante Marcella est retrouvée assassinée et Giovanna qui est suspectée. Son père n’ose pas d’abord pas s’avouer que sa fille ait pu commettre ce crime, sa mère est désespérée et un procès se prépare. L’histoire de famille de Giovanna et de son père se déroule sur plusieurs années qui aborde l’Histoire de l’Italie : la montée du Duche, la Seconde Guerre Mondiale, les fusillades des sympathisants fascistes... Si on s’intéresse bien à l’évolution des liens de cette famille et de leur entourage, ces évènements politiques – peu exploités - servent, en revanche, juste de décors d’époque. Au final, le film n’a pas su vraiment toucher les festivaliers.

L'Autre : Tout arrive, même à 47 ans, dit une pub à la télévision que regarde Anne-Marie. C’est d’ailleurs elle-même une femme de 47 ans, séparée de son mari après 18 ans de vie commune, et en train de rompre avec son dernier compagnon. Elle va peu à peu arriver au constat qu’elle ne veut pas une autre vie, mais posséder la sienne enfin. L’autre dépeint autant une relation amoureuse qui trouble les identités que la solitude des grandes villes où l’on est tout seul ensemble. Ce film de Patrick Mario Bernard et Pierre Tridivic nous fait voir un troublant portrait de femme interprétée par Dominique Blanc. Elle y incarne une femme à la dérive obsédée par « l’autre », et l’autre qu’elle pourrait être va la faire déraper vers la folie…

Vinyan : Enfin on découvre le nouveau film (après Calvaire) de Fabrice Du Welz. On en connaissait déjà le début : Jeanne (Emmanuelle Béart, qui joue en anglais) et Paul (Rufus Sewell) ont perdu leur fils Joshua lors du tsunami de 2004. Un jour Jeanne croit le reconnaître sur une vidéo : elle convainc Paul que si c’est le seul espoir pour qu’il ne soit pas mort il faut aller le rechercher. Ils partent vers la frontière birmane et vers une jungle inconnue… Le film est un voyage sensoriel qui part des rues grouillantes de vie jusqu’aux rives de la mort. La douleur va dévorer ce couple dans cette quête d’une partie de soi.
Morceaux choisis de la conférence de presse :
Fabrice Du Welz : Après Calvaire je pouvais en fait faire le genre de film que je voulais, comme un remake ou quelque chose de plus commercial. J'ai préféré réaliser un film très cinématographique avec une belle ambition de cinéma.
Emmanuelle Béart : J'avais vu Calvaire à Cannes, quand j'y étais membre du jury. J'ai alors voulu ensuite rencontrer ce réalisateur, même si lui avait en tête quelques actrices anglophones pour ce nouveau film. J'étais persuadée que Fabrice allait traiter un sujet aussi particulier et fort que le deuil d'un enfant avec un vrai point de vue.
Fabrice Du Welz : Le style m'intéresse : ce qui m'intéresse c'est comment transcender l'histoire par la forme.
Emmanuelle Béart : J'ai voulu entrer dans la vision de quelqu'un, de la sienne en tant que réalisateur. Il s'agissait de partir tourner sans maquillage ni autre artifice de star française, juste partir simplement comme actrice. C'est un cap pour moi ce film, un passage.
Fabrice Du Welz : Le tsunami c'était un point de départ à l'histoire que je voulais raconter. C'est pour le prologue, c'est visuel et poétique, mais Vinyan c'est l'histoire d'un couple qui a perdu un enfant, sans mélo et aussi sans pudeur.

Vinyan ça signifie âme errante et ça sera au cinéma à partir du 1er octobre.

Venise ? Direction le Palazzo Grassi en compagnie de Amira Casar et de Pascal Grebgory pour le cocktail de la cérémonie du Gucci Group Award 2008. Les nommés étaient Julien Schnabel pour le film Berlin (avec Lou Reed), Adam Yauch (un des Beastie Boys) pour son documentaire Gunnin' for That #1 Spot, Isaac Julien pour le film Derek (écrit par Tilda Swinton),… quelques coupes de champagne plus tard and the winner is : Steve Mc Queen pour son film Hunger(qui a eu déjà la Caméra d’Or à Cannes). C’est Isabelle Huppert, membre du jury, qui a remis cet award à Steve McQueen.

Christophe Maulavé (Venise, le 1er Septembre 2008)