Venise ? Une histoire de souvenirs...

Rachel getting married : On découvre Kym à la sortie d’une centre de désintoxication, elle va retrouver sa famille car sa sœur Rachel va se marier. Mais, dans cette préparation de fête nuptiale qui doit réunir tout le monde, un évènement tragique va alors ressurgir et provoquer bien des tensions…
Jonathan Demme (Le silence des agneaux, Philadelphia) revient à la fiction après des documentaires sur la politique (The Agronomist) ou la musique (Neil Young : Heart of gold), et à priori ça devait être une bonne nouvelle. Après quelques remakes, Jonathan Demme semble cette fois découvrir la joie de faire du cinéma sans grosse machinerie. Il utilise une caméra numérique très mobile, capte des moments où ses acteurs jouent apparemment sans avoir répété, la musique vient de musiciens présents dans les scènes, une famille se dispute… Bref c’est presque un remake de Festen, en moins réussi.
Cependant il faut reconnaître que Rachel getting married, bien que trop long, est un film qui sait séduire, surtout grâce à deux femmes : Jenny Lumet (fille de Sydney Lumet) à l’origine du scénario, et Anne Hathaway qui pourrait mériter un prix d’interprétation. Cette dernière est celle dont le retour va raviver des souvenirs douloureux dans la famille. A la fois forte et fragile, elle illumine le film. Rachel getting married est un mélodrame plutôt convenu (culpabilité, remord, pardon, réconciliation…) mais dont la fraîcheur fait passer un bon moment.

Les plages d'Agnès : Agnès Varda qui fait un film sur Agnès Varda ? C’est la surprise la plus étonnante du jour en fait. Elle devance ainsi un documentaire sur sa personne en le réalisant elle-même sous forme d’autoportrait. Si au début son installation de miroirs sur une plage laisse planer le doute, le film est ensuite traversé de multitudes de bonnes idées et de moments touchants.
Agnès Varda opère un retour en arrière sur sa vie et livre ses souvenirs en même temps qu’elle les refabrique. On passe de son enfance à son apprentissage de la photographie, sa rencontre avec Jacques Demy et la Nouvelle Vague (Cléo de 5 à 7), la fabrication de ses films, ses amis (Alain Resnais, Jean Vilar, Catherine Deneuve, même Jim Morisson), ses enfants et la mort de son mari, son féminisme et ses expérimentations plastiques… Le film tient autant du portrait intime d’Agnès que du travail de Varda. Les plages d'Agnès est un voyage dans la mémoire de Agnès Varda autant que dans l’histoire du cinéma qu’elle a su marquer à sa manière.

The Hurt Locker : Et un nouveau film sur la guerre en Irak, ou plutôt sur certains soldats engagés. Le film suit une unité dont la mission est de désamorcer des bombes en terrain ennemi. La scène d’ouverture nous plonge d’ailleurs directement au cœur de l’action. Pendant plus de deux heures, on va suivre surtout le quotidien d’un trio de soldats dont le travail est de désamorcer une bombe. Du coup, le film n’a pas de point de vue partisan sur la guerre (même s'il penche tout de même vers la valorisation des militaires), mais évoque l’adrénaline de ces volontaires pour le combat : certains ont un comportement trompe la mort et sont excités par ce qu’ils font. On est d'ailleurs prévenus dès le début : " la guerre est une drogue ".
The Hurt Locker est un film de mecs réalisé par une experte Kathryn Bigelow (Point break, Strange Days, K-19 : Le Piege Des Profondeurs), mais cette fois elle est moins pertinente. A l’image de cette guerre, elle s’embourbe dans une longue succession de séquences d’opérations de déminage en oubliant presque d’approfondir son sujet sur les cinglés de la gâchette qui s’affirment au péril de leur vie.

Venise ? Un cliché veut que les gondoliers chantent "Oh sole mio", certains sifflent la mélodie en fait.

Christophe Maulavé (Venise, le 5 Septembre 2008)