Wind River, Mary : quand les Avengers reviennent au cinéma indépendant

Wind River, Mary : quand les Avengers reviennent au cinéma indépendant

Ce mois-ci trois membres des célèbres Avengers de Marvel sont à l’affiche de petits films indépendants, bien loin du tapage des blockbusters. Jeremy Renner et Elizabeth Olsen, alias Hawk-Eye et Wanda Maximoff la Sorcière rouge, portent Wind River (en salles depuis le 30 août) alors que Chris « Captain America » Evans tient l’affiche de Mary (sortie le 13 septembre). Voilà de belles occasions de nous rappeler qu’ils sont des comédiens bien plus complets et talentueux que ce que leurs rôles de superhéros nous laissent entrevoir.

Révélé en 2009 par son rôle intense dans Démineurs de Kathryn Bigelow, Jeremy Renner avait très vite confirmé avec une belle prestation dans The Town de Ben Affleck l’année suivante. Grand espoir du cinéma américain, certains lui voyaient un futur brillant, du calibre des Matt Damon, Brad Pitt ou autre Leonardo DiCaprio. Malheureusement ses choix l’ont empêché d’atteindre les sommets espérés. S’il se battit tout de même une carrière plus que respectable comme le prouve par exemple le récent Premier Contact, il n’est pas arrivé à gravir le dernier échelon vers le statut des plus grands.

Plusieurs exemples sont assez évocateurs et le premier n’est autre que la prestigieuse franchise des Mission Impossible qu’il a intégré pour les quatrième et cinquième épisodes. S’il y a fait une entrée remarquée dans Mission : Impossible - Protocole Fantôme, il est nettement moins présent dans Mission : Impossible - Rogue Nation où il reste dans l’ombre de l’épouvantail Tom Cruise. Même chose pour le deuxième exemple : Avengers. Renner interprète Hawk-Eye, sans pouvoir et relégué comme second couteau de l’équipe Marvel. Son personnage est loin d’être inintéressant mais il est sous-exploité, cantonné au second plan. Enfin le troisième et dernier exemple est peut-être le plus frappant. Jeremy Renner a été choisi pour relancer la saga Jason Bourne dans son spin-off Jason Bourne : L’Héritage. Il y interprète Aaron Cross, un autre super-soldat manipulé et traqué par la CIA. Le résultat n’est pas à la hauteur des espérances et tombe vite dans l’oubli quand Matt Damon et Paul Greengrass décident de faire leur retour à la tête de la franchise. Renner avait là une chance de donner une nouvelle ampleur à sa carrière, c’est raté. Trois franchises énormes dans lesquelles il ne démérite pas, loin de là, mais qui ne le font pas grandir et qui ne lui donnent pas l’opportunité d’exploiter son savoir-faire pleinement.

Avec Wind River il revient enfin vers un cinéma plus authentique. Il y retrouve Elizabeth Olsen et leur duo excelle dans le nouveau film de Taylor Sheridan. Scénariste acclamé de Sicario et Comancheria, Sheridan a cette fois-ci la casquette de réalisateur en plus de celle d’auteur. Sa mise en scène a d’ailleurs été récompensée à Cannes cette année dans la section Un Certain Regard. Wind River est un excellent film d’enquête à l’ambiance pesante, à la croisée entre le western et le polar enneigé. Jeremy Renner interprète un pisteur de la réserve indienne de Wind River. Après y avoir découvert le corps sans vie d’une femme, il va aider une jeune agent du FBI, jouée par Elizabeth Olsen, à trouver le coupable du meurtre. Une investigation bien menée sur fond de conflit entre les indiens et les blancs et qui fait ressurgir un lourd passé. Si la mise en scène a justement été applaudie, l’écriture est également remarquable par la qualité et la profondeur des ses personnages et de son histoire. Une belle maîtrise de la part de Taylor Sheridan.

Jeremy Renner impose à nouveau son charisme et l’intensité de son jeu. Des qualités qu’il n’avait pas perdues mais qu’il n’avait plus eu l’occasion de mettre à ce point en avant. Sans doute sa meilleure performance depuis Démineurs. Voilà peut-être un renouveau qui va redéfinir la suite de sa carrière. Quant à Elizabeth Olsen, elle n’est pas dans la même situation que son partenaire de jeu puisque moins médiatisée. Sa belle prestation dans Wind River s’inscrit dans la continuité d’une carrière prometteuse.

Venons-en désormais à Chris Evans. Après avoir joué la Torche dans deux volets des 4 Fantastiques en 2005 et 2007, c’est quatre ans plus tard avec le rôle de Steve Rogers dans Captain America : First Avenger qu’il est propulsé au rang de superstar. Le grand public ne le connait que pour ça mais il est lui aussi capable de bien plus que d’uniquement montrer ses muscles dans des collants. Sa performance dans l’excellent Snowpiercer, Le Transperceneige de Bong Joon-Ho en était déjà une belle preuve.
Avec Mary, il se retrouve devant la caméra d’un autre « exilé » des films de superhéros : Marc Webb, réalisateur des deux volets de The Amazing Spider-Man. Révélé par 500 jours ensemble, Webb revient lui aussi à un cinéma plus intimiste.

Cette collaboration nous offre l’histoire de Frank qui élève sa nièce Mary suite à la mort de sa sœur. Agée de six ans et surdouée, il tente de lui offrir une enfance des plus normales jusqu’à ce que sa mère vienne essayer de tirer profit du don pour les mathématiques de sa petite-fille. Un beau film sur l’éducation des enfants, surdoués ou non, sur les conséquences de la perte d’un être cher et sur les conflits familiaux. Rien de révolutionnaire dans l’histoire mais on est touché par ses personnages. Chris Evans développe ici une palette d’émotions à la fois plus large et plus nuancée que dans l’univers Marvel. Il forme un duo attachant avec la jeune Mckenna Grace qui joue Mary. Cette dernière impressionne pour son jeune âge alors que la toujours parfaite Octavia Spencer complète le casting.

Nous avons d’ailleurs rencontré Marc Webb pour une interview

Vous l’aurez compris, voilà deux films qui méritent le détour et qui nous rappellent que Jeremy Renner et Chris Evans ne sont pas que des Avengers. Une belle façon pour eux de prendre une bouffée d’air frais entre deux films tournés sur fond vert en studio et de sortir du cadre trop restrictif des blockbusters. Tant mieux pour nous, on en redemande !

Vincent Kempf (13 septembre 2017)